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9 novembre 2009

9 novembre 1989

Il y a 20 ans, j'étais une jeune journaliste arpète en voyage scolaire super méga gonflant en Allemagne de l'Ouest (c'est ce qu'on disait à l'époque). Je ne parlais pas allemand. Je m'enquiquinais à cent sous de l'heure dans des conférences fumeuses toutes plus soporifiques les unes que les autres qui m'apprirent néanmoins la différence entre les diverses eaux gazeuses germaniques.

Bonn. Fondation Konrad Adenauer. Berlin. Frontière. Miradors. Barbelés. Vopos. Il faisait gris et froid. On était tous emmitouflés dans des écharpes en laine tricotées par nos grands-mères. On se prenait à délirer : le Mur va tomber, tiens, ça serait marrant et incroyable. Rien n'est impossible. Allez, arrête tes vannes. Oui, mais quand même : imagine si ça arrive... N'importe quoi...

L'apprenti journaliste a cela de magnifique qu'il ne doute de rien. Jamais. Il imagine l'invraisemblable. Suppute de l'événement alors que ledit événement n'est pas encore arrivé. L'apprenti journaliste rêve. Délire. Rigole. Mais se tient toujours sur le qui-vive, des fois que...

En ce 9 novembre 1989, à peine installé dans une chambre de l'auberge de jeunesse de Berlin, pas loin du zoo (si mes souvenirs ne me trahissent point), la rumeur, ou plutôt l'info, circule à vive allure sous la voix de Nicolas W. (il a des sources, parait-il, au sein même de l'armée française, voyez donc ca, madame). Le sieur Nicolas est un grand déconneur devant l'Eternel. Mais enfin, le voilà qui passe dans les chambres et annonce l'impossible à croire : le Mur va tomber ce soir.

L'apprenti journaliste est crevé. Doute. Se pose mille questions qui se terminent toujours par un "Mais si c'était vrai ?" C'est trop incroyable, impensable, inimaginable. Pourquoi ce soir et pas un autre ? Quoi ? LE Mur ? Non. Non. Non. Et si c'était vrai ?

L'apprenti journaliste saute dans ses chaussures, attrape au vol un appareil photo néandertalien et file Place de Brandebourg. Mettre en doute la parole de quelqu'un, c'est aller voir de ses propres yeux, vérifier sur place, évaluer la situation. Il est 21 heures. Le Mur se dresse, tagué de partout. Il est très beau. Tout à coup, l'Histoire prend sens. Mon désintérêt crasse pour cette partie de l'Histoire fond en un clin d'œil.

Les télés ricaines sont là. Les gens affluent peu à peu. Nous montons sur le Mur. Chaleur d'une entraide instantanée. On partage tous le même espoir foldingue. Sur Le Mur, un cordon de Vopos en formation French Cancan, armés jusqu'aux dents. La danse de la nuit ne fait que commencer. Nous serons arrosés par centaines, pour finalement oser descendre côté interdit. Est, nous voilà. Au loin, les clameurs des Allemands de l'Est font écho aux clameurs de ceux à l'Ouest.

Trois jours, trois nuits de folie.

Vingt ans plus tard, je ferme les yeux. Je n'ai jamais oublié que ce soir-là, j'avais une conscience aigue de vivre l'Histoire en direct, d'en faire complètement partie. Ce soir-là, surtout, j'ai osé croire en l'espoir d'un monde tellement meilleur...

 

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Commentaires
M
Par un détour bizarre, je retrouve ton blogue, j'ai honte... mais je ne me retrouve plus dans ma liste d'adresses... j'ai encore plus honte. Tu sais l'ordre et les ours, ¸¸ca ne va pas beaucoup ensemble. Tu me fais un petit courriel svp ?
C
A choisir, le Mur... de là où je suis maintenant, les tremblements de terre ne me font pas envie envie... T'as dû avoir sacrément les chocottes, non ???
L
Et moi quelque jours avant, je vivais le tremblement de terre de San Francisco :) A chacun son histoire.. lol. En tous cas, cool que tu sois passée là à ce moment là !
Le Croissant Masqué
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